Corps fragmenté et pouvoir rédempteur du poétique chez José Martí
Résumé
Le poète et penseur José Martí (Cuba, 1853-1895) a élaboré une réflexion politique et sociale, culturelle et esthétique, profondément émancipatrice dans ses nombreux essais et ses articles, publiés dans des revues qu’il animait ou dans la presse des pays où il a résidé en exil. Dans diverses publications en prose ou ses cahiers de notes, concernant notamment la poésie, il laisse apparaître ses exigences éthiques et son désir de rénovation formelle : « La poesía ha de tener la raíz en la tierra, y base de hecho real ».
A travers quelques textes poétiques et critiques de José Martí, écrits entre 1881 et 1891, qui mettent en lumière la quête identitaire du Je et du Nous (corps individuel / corps social), nous tenterons de mettre en parallèle le processus de fragmentation des sens de perception et la mise en scène allégorique d'un violent dépouillement mystique (cœur et entrailles arrachés), afin de reproduire l'élan généreux envers autrui d'émotion pure, telle que la concevait idéalement le poète cubain. Dans sa mise en texte de l'expérience émotionnelle de la voix lyrique, du souffle épique et de la perception visuelle et auditive en fusion constante avec les éléments naturels, le poète s’efforce de reproduire son approche sensorielle et spirituelle du monde et de partager avec l’autre l'élan vital, en quête d’une transcendance qui doit le mener à la métamorphose rédemptrice : c’est le fondement de son esthétique dans le cadre du renouveau des arts à la fin du XIXe siècle.